Face au refus du Service interacadémique des Examens et Concours (SIEC) d’accorder une demande de tiers-temps aux épreuves du Diplôme national du Brevet (DNB), auquel le candidat en situation de handicap avait eu droit pendant toutes ses années de collège, ses parents ont été contraints de saisir le juge des référés du Tribunal administratif de Paris pour faire valoir l’égal accès à l’instruction et la compensation des conséquences du handicap de leur enfant.

Lors de sa campagne présidentielle de 2017, le Président de la République s’était engagé en faveur du handicap à travers diverses mesures telles que le plan d’accompagnement personnalisé (PAP), au bénéfice des élèves en situation de handicap.

L’adoption du PAP intervient dans le cadre d’un grand service public de l’Ecole inclusive, annoncé le 11 juin 2019 par le ministre de l’Education nationale et de la Jeunesse et la secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre en charge des Personnes handicapées.

La plupart des élèves bénéficiant d’un PAP sont des élèves atteints de troubles spécifiques des apprentissages – appelés aussi « troubles DYS » – qui regroupent la dysgraphie, la dyspraxie, la dyscalculie, la dysorthographie, la dyslexie, la dysphasie.

Il s’agit plus précisément d’un handicap cognitif invisible. C’est pourquoi, les élèves qui en sont atteints peuvent bénéficier d’aménagements au cours de leur scolarité mais également pendant les examens nationaux.

L’article D311-13 du Code de l’éducation dispose que

« les élèves dont les difficultés scolaires résultent d’un trouble des apprentissages peuvent bénéficier d’un plan d’accompagnement personnalisé prévu à l’article L311-7 [du même code], après avis du médecin de l’éducation nationale ».

En prévision des épreuves des 28 et 29 juin 2021, les représentants légaux de l’élève, souffrant de dyspraxie, de dysgraphie, de troubles visuo-spatiaux et d’anxiété ont déposé une demande d’aménagements pédagogiques, dès le mois de novembre 2020, auprès du SIEC.

Les quatre aménagements qui avaient été demandés en vue du passage du DNB figuraient parmi les dix aménagements octroyés dans le PAP dont bénéficiait cet élève en classe de troisième, pour l’année scolaire 2020-2021.

Ces quatre aménagements étaient les suivants :
- Sujets aérés en utilisant la police ARIAL 14, interligne 1,5 ;
- Utilisation de l’ordinateur ;
- Tiers temps ;
- Dictées à trous.

Dans une décision du 1er avril 2021, le SIEC leur a opposé une décision de refus partiel, alors que ces troubles ont été constatés et étayés par plusieurs certificats et bilans médicaux. En effet, le SIEC n’a accordé qu’un seul des quatre aménagements demandés, à savoir « l’utilisation de l’ordinateur ou de la tablette du candidat ».

Face à ce refus, les parents du candidat en situation de handicap ont alors formé un recours gracieux auprès du Directeur du SIEC. En parallèle, la Médiatrice de l’Education nationale a été saisie. Le Défenseur des droits a également été saisi, compte tenu de l’atteinte grave et manifestement illégale que porte ce refus à plusieurs libertés fondamentales, à savoir l’égal accès à l’instruction, le droit à l’égalité et le droit à la compensation des conséquences du handicap, consacrés tant en droit international qu’en droit français.

En l’absence de réponse à leur recours gracieux, contraints par l’échéance des épreuves, les parents du candidat ont contesté la décision du SIEC, par le ministère d’un avocat, en saisissant le Tribunal administratif de Paris d’une requête en référé-liberté, sur le fondement de l’article L521-2 du Code de justice administrative.

Les faits de cette espèce ont permis de caractériser les quatre conditions exigées pour gagner un référé liberté : l’urgence, l’exercice d’un pouvoir appartenant à l’autorité administrative, l’atteinte à une liberté fondamentale, l’existence d’une atteinte grave et manifestement illégale portée à cette liberté.

Dans son mémoire en défense, le SIEC faisait valoir que le tiers-temps était une surcompensation créant une inégalité au détriment des candidats valides, invoquant notamment la jurisprudence « Mlle Stickel » du Conseil d’Etat en date du 21 janvier 1991.

Par une ordonnance du 3 juin 2021, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris a ordonné au directeur du SIEC d’accorder au candidat un tiers temps supplémentaire et la dictée à trous, pour les épreuves du DNB, dans le délai de dix jours à compter de la notification de l’ordonnance. La décision d’aménagements a été modifiée par le SIEC, le lendemain.

Récemment, dans une affaire similaire, le juge des référés du Conseil d’Etat a confirmé la décision du juge des référés de première instance dans un arrêt en date du 13 mars 2020 qui avait enjoint le rectorat d’Aix-Marseille de mettre en place la totalité des aménagements préconisés au requérant atteint de dysorthographie, de dysgraphie, de dyslexie et de dyspraxie, pour compenser son handicap, au concours de l’agrégation d’histoire.

Bien motivée, une requête en référé liberté peut dépasser le stade de l’ordonnance dite de « tri » et permettre au juge d’attribuer les aménagements dont bénéficie habituellement le candidat en situation de handicap, pour permettre une réelle égalité des chances.

Article co-écrit avec Nadia Belkacem, étudiante